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Résumé : Dans cette présentation, je me propose de définir l’apport de l’EMDR dans le travail bioénergétique sur le trauma et les stress post traumatiques.
Je commencerai cet exposé par une présentation succincte de l’analyse bioénergétique puis de la thérapie EMDR.
J’essaierai ensuite de démontrer comment, au niveau théorique, l’EMDR confirme, si besoin en était, le fondement des thérapies psychocorporelles, et apporte une validation supplémentaire de l’inscription somato-psychique du traumatisme.
Enfin, à partir de quelques vignettes cliniques, j’évoquerai comment j’utilise l’EMDR au cours d’une thérapie bioénergétique.

L’APPORT DE L’EMDR DANS LE TRAVAIL BIOENERGETIQUE SUR LE TRAUMA.

Robert FAURY, © 2016

Conférence Journées d’études francophones en Analyse Bioénergétique, Toulouse Octobre 2016
Conférence publiée dans la revue des sociétés francophones d’Analyse Bioénergétique « Le corps et l’analyse », Volume 17 : Le trauma et le corps, Automne 2016.


Dans cette présentation, je me propose de définir l’apport de l’EMDR dans le travail bioénergétique sur le trauma et les stress post traumatiques.
Je commencerai cet exposé par une présentation succincte de l’analyse bioénergétique puis de la thérapie EMDR.
J’essaierai ensuite de démontrer comment, au niveau théorique, l’EMDR confirme, si besoin en était, le fondement des thérapies psychocorporelles, et apporte une validation supplémentaire de l’inscription somato-psychique du traumatisme.
Enfin, à partir de quelques vignettes cliniques, j’évoquerai comment j’utilise l’EMDR au cours d’une thérapie bioénergétique.

L’analyse bioénergétique.

Quand je reçois un patient pour la première fois, je lui présente l’analyse bioénergétique comme étant une thérapie psychocorporelle. Je lui dis que je l’accueille en tant que personne avec un mental, un psychisme, mais aussi avec un corps et des émotions.

Je lui précise qu’à mes yeux, aucune activité psychique ne saurait exister par « l’opération du saint esprit », qu’elle s’incarne toujours dans un substrat physique sous-jacent qui la matérialise – le corps physiologique. Qu’il s’agisse de neurones, de muscles, d’organes ou de tout autre tissu : ces 100 mille milliards de cellules s’organisent en un tout intégré qui font de lui un être humain.

Dans l’analyse bioénergétique, il y a un travail analytique à partir de l’échange verbal. Avec pour objectif d’amener le patient à comprendre sa propre histoire, et notamment ce qui dans son histoire, est à l’origine des difficultés dont il souffre aujourd’hui.

Mais souvent le patient a compris et pour autant rien ne change ! Ma conviction, mais aussi mon observation, c’est que pour que les choses changent, il faut s’attacher à « réorganiser » ce qui a besoin de l’être, au niveau sous-jacent du corps et des émotions. Dans l’analyse bioénergétique, il y a donc un travail corporel, qui a pour visée cette réorganisation au niveau tonico-émotionnel : travail sur la respiration pour augmenter le niveau énergétique et la vitalité de l’organisme, travail d’enracinement en vue d’améliorer la perception et retrouver une plus grande sensibilité, travail en vue de libérer les émotions refoulées mais aussi d’apprendre à les exprimer de façon maîtrisée.

Ainsi, l’analyse bioénergétique est bien une psychothérapie intégrative, en ce sens qu’elle se fixe de résoudre les difficultés d’une personne, en travaillant celles-ci dans toutes les couches où elles sont inscrites : dans le corps physique, dans l’émotionnel et dans le mental. Et c’est bien, à mes yeux, cette prise en compte globale, qui permet de construire peu à peu un véritable changement de façon durable.

Dans le travail bioénergétique sur le trauma, le thérapeute vient créer les conditions du dégel en partant directement du corps. Dans la terreur, l’organisme s’est instantanément rigidifié, gelant toute vie émotionnelle, court-circuitant le plus souvent toute perception sensorielle.

Par la respiration qu’il va amplifier, par les mouvements qu’il va encourager, l’analyste bioénergéticien tente de provoquer ce dégel. Son accueil empathique, soutenant et rassurant, encouragent ce réveil émotionnel : cris, pleurs, sanglots, tremblements, vont dès lors être le passage par lequel la terreur et les autres émotions vont pouvoir s’évacuer. Peu à peu, le corps retrouve son homéostasie et sa détente, libération émotionnelle et relâchement du corps se correspondant en vases communicants. L’information bloquée circule à nouveau et alimente désormais les réseaux neuroniques du cortex. Le trauma devient un évènement que le patient peut maintenant se représenter. Il va dès lors pouvoir s’en distancier, et le remettre dans une nouvelle perspective.

L’EMDR.

La thérapie EMDR a été élaborée par Francine Shapiro, psychologue américaine, après qu’elle ait observé sur elle-même de bien surprenantes manifestations. Voici ce qu’elle nous en dit :

« L’EMDR est basé sur une observation fortuite que j’ai faite en mai 1987. Un jour, comme je me promenais dans le parc, je remarquai que des pensées que j’avais et qui me perturbaient, soudain disparaissaient. Je réalisai aussi que quand ces pensées me revenaient à l’esprit, elles n’étaient pas aussi bouleversantes et valables qu’avant… Ce qui attira mon attention ce jour, fut que ces pensées qui me tourmentaient disparaissaient et changeaient sans effort conscient. Fascinée, je commençai à faire très attention à ce qui se passait. Je remarquai que quand ces pensées me venaient à l’esprit, mes yeux spontanément commençaient à bouger dans un mouvement de va-et-vient très rapide… C’est alors que je commençai à faire bouger mes yeux délibérément, tout en me concentrant sur une variété de pensées et de souvenirs perturbateurs, et je découvris que ces pensées disparaissaient aussi et perdaient leur charge. »

Francine Shapiro venait de découvrir le mécanisme censé nous aider à guérir les traumatismes, dont on parlera en termes de mouvements oculaires, et qui sera théorisé plus tard sous l’appellation de stimulations bilatérales alternées. On stimule la vision en faisant bouger les yeux alternativement de gauche à droite. Cela provoque des stimuli qui vont remonter via la chaîne sensitive jusqu’au cerveau, activant alternativement et de façon inversée, les hémisphères droit et gauche du cerveau. On suppose que ces stimulations bilatérales alternées, remettent le cerveau au travail sur les épisodes traumatiques non digérés, que l’on se propose de traiter.

On découvrira plus tard que ces stimulations bilatérales alternées, produisent les mêmes effets à partir d’autres sens, pour peu que ceux-ci puissent être manipulables. Il en va ainsi des stimulations auditives et des stimulations tactiles. J’utilise pour ma part le plus souvent, un petit appareil qui envoie des bips de façon alternée, oreille droite – oreille gauche, où je peux modifier la fréquence ainsi que l’intensité. C’est pourquoi je parlerai de stimulations auditives, quand j’évoquerai dans cette présentation, la mise en œuvre du processus EMDR.

Sur quel postulat la thérapie EMDR s’appuie-t’elle ?

Lorsque nous nous blessons, il nous suffit de désinfecter la plaie et de la protéger, pour qu’au fil des jours, celle-ci se referme d’elle-même au fur et à mesure que de nouvelles cellules se forment et s’organisent entre elles. Apparaît alors une cicatrice qui finira aussi par disparaître, si la lésion n’est pas trop importante. Le corps déclenche ainsi de lui-même, des processus d’auto guérison appropriés, afin de reconstituer ses tissus abîmés.

Pareillement, lorsque nous sommes contaminés par un agent infectieux, notre corps se met en état d’alerte (élévation du rythme cardiaque, de la pression artérielle, de la température, etc.) ; puis, aussitôt après avoir identifié l’intrus, il fabrique les anticorps spécifiques, afin de détruire les cellules étrangères et amener la guérison.

La théorie EMDR postule que de la même façon, au niveau psychique, nous disposons tous dans notre cerveau d’un système de traitement de l’information, qui nous permet d’intégrer les événements, même les plus douloureux, que nous sommes amenés à vivre. Ce système peut cependant se bloquer, empêchant dès lors tout traitement approprié de l’expérience que nous avons vécue. Cela se produit quand nous sommes confrontés à certaines situations blessantes qui, parce qu’elles ont été trop fortes ou trop répétées, n’ont pu être traitées valablement par le cerveau. Nous retrouvons ici la notion générale du traumatisme.

La thérapie EMDR se propose de traiter le traumatisme qui n’a pas été « digéré » par le cerveau, en remettant en marche, par les stimulations bilatérales alternées, les processus naturels d’auto guérison du système de traitement de l’information. Ce traitement de l’information permettra alors de dissoudre, puis d’intégrer ce vécu traumatique laissé en suspens, entraînant aussitôt une réorganisation en schémas positifs tant aux niveaux physiologique et tonico-émotionnel qu’aux niveaux cognitif et comportemental.

Qu’est-ce que j’observe quand je travaille en EMDR ?

Quand je travaille en EMDR et que j’applique les stimulations auditives, j’observe des manifestations diverses qui se produisent, différentes d’un patient à l’autre : des mouvements du corps parfois (spasmes au niveau des membres, légers tremblements d’une partie du corps pouvant aller jusqu’à de plus fortes secousses, etc…). Les patients décrivent parfois eux-mêmes des courants d’énergie à l’intérieur de leur corps, des contractions, des oppressions, des relâchements. Ils peuvent aussi faire état de sensations de chaleur, de froid, de tension, de détente. Ils peuvent également évoquer les émotions qu’ils ressentent, et parfois les exprimer de façon plus ou moins intense. Le patient peut également décrire des images qui lui viennent spontanément, certaines ayant du sens comme des souvenirs retraçant des épisodes de sa vie, d’autres dont le sens échappe, comme dans les rêves et les cauchemars, où le cerveau semble travailler par métaphores et symbolisations. Enfin des pensées apparaissent, non construites comme dans une réflexion consciente, mais surgissant plutôt sous forme d’évidences et d’enchaînements spontanés.

A l’observation, le processus de traitement de l’information mis en œuvre dans la thérapie EMDR, provoque bien un travail de la personne dans sa globalité, dans toutes ses dimensions : les mouvements du corps et les sensations perçus attestent bien de processus à l’œuvre au niveau du corps physiologique et du cerveau reptilien ; les affects ressentis, souvent exprimés, parfois juste détectés dans un changement des traits du visage, prouvent bien l’existence d’un traitement émotionnel au niveau du système limbique. Et les images ou les pensées induisent l’existence d’un travail mental au niveau du cortex. Comme dans l’analyse bioénergétique, toutes les dimensions de la personne sont impliquées dans le travail thérapeutique, et suggèrent que les trois cerveaux (reptilien, émotionnel et cortical) travaillent en même temps et de concert à la « digestion » du traumatisme. Pour intégrer l’évènement traumatique, l’EMDR active bien un processus de résolution dans toutes les couches où celui-ci est inscrit ; la thérapie EMDR peut donc être considérée comme une thérapie intégrative.

Ainsi, au niveau théorique, l’EMDR confirme, si besoin en était, le fondement des thérapies psychocorporelles et de l’analyse bioénergétique en particulier, en ce sens que les blocages psychologiques se structurent bien dans le corps physiologique, et que pour être traités, ils doivent d’abord l’être au niveau du corps lui-même. Et c’est bien ce que je vérifie en EMDR, où le plus souvent, j’observe ce travail commencer par les mouvements et les sensations, avant que l’élaboration mentale n’intervienne dans un second temps. L’EMDR apporte ainsi une validation supplémentaire de l’inscription somato-psychique du traumatisme.

Dans la pratique, au cours d’une thérapie bioénergétique, j’utilise l’EMDR dans deux cas : quand le travail corporel ne produit pas de résultat, et quand je sens qu’un traumatisme n’est pas suffisamment cicatrisé.

1 Blocage émotionnel

S’il y a échec du travail corporel, le patient reste bloqué dans son trauma, pas d’émotion, les mouvements restent mécaniques… Je vais appliquer le processus EMDR à ce qui reste mémorisé du trauma, pour tenter de déclencher un processus de résolution, sans passer par le travail à même le corps. Les stimulations auditives vont être entreprises, tout en demandant au patient de faire revenir en mémoire, l’instant le plus prégnant du souvenir traumatique, qu’il s’agisse d’une image, d’un son ou d’une sensation. Si le processus EMDR s’enclenche, le patient est emporté par ce processus de résolution dont il semble n’être devenu que le spectateur.

Vignette clinique : Cécile

Cécile, 31 ans, a fait un parcours assidu et très investi en analyse bioénergétique pendant plusieurs années. Elle a retrouvé une bonne santé et une joie de vivre, elle va bien dans sa vie. Il reste cependant quelques épines qui semblent ne pouvoir être retirées, comme cette angoisse qui la saisit dès qu’il s’agit de laisser aller sa nuque. Ce qu’elle redoute le plus : aller chez le coiffeur où elle éprouve une peur panique lorsqu’elle doit, au moment du shampoing, renverser sa tête en arrière sur le bac. Je lui propose de traiter cela en EMDR, elle est d’accord.
Je lui demande de fermer les yeux, de retrouver ce moment chez son coiffeur et de noter ce qui lui vient. Elle se rappelle deux souvenirs. Le premier, elle a 12 ans, alors qu’elle fait du trampoline, elle se blesse en retombant sur la tête et ressentira une douleur fulgurante sur le moment, et qui restera très forte pendant plusieurs semaines. Séances de kinésithérapie, d’ostéopathie seront un véritable calvaire avant d’en venir à bout. Le second souvenir, elle a 17 ans, un praticien chiropracteur lui dit au cours d’une séance : « Vous avez une malformation des cervicales, c’est dangereux! ».

Je lui proposerai de partir de ces deux épisodes anciens, et du souvenir plus actuel de la dernière fois où elle a dû faire un shampoing chez son coiffeur. La perturbation ressentie en commençant est faite de peur panique et de tension dans son corps. Elle évalue l’intensité de cette perturbation à 8 sur une échelle allant de 0 à 10. La pensée négative qui lui vient alors est « je vais finir paralysée ». La pensée positive qu’elle préfèrerait avoir : « je vais bien, je suis en sécurité ». Cécile dit ressentir cette pensée positive comme vraie à 3 sur une échelle allant de 1 à 7, où 1 serait tout à fait faux et 7 tout à fait vrai.

Le suivi de ces paramètres permettra d’évaluer l’avancée du traitement et de valider sa fin. Je précise que pendant les stimulations bilatérales alternées, le patient ne parle pas. Ce n’est qu’à chaque interruption qu’il pourra évoquer ce qu’il a vécu. Cela aidera le thérapeute à saisir le cheminement de son patient et ainsi mieux l’accompagner vers sa guérison.

1ère séance : Je pars sur la scène la plus ancienne de sa chute sur le trampoline.

Les stimulations auditives feront venir plusieurs manifestations, dont je vais vous décrire les principales dans l’ordre où elles sont apparues.

Elle dit sentir sa nuque et ses épaules se figer comme de la glace ; j’observe sa respiration bloquée.

Quelques larmes apparaissent. Sa respiration augmente, les pleurs surgissent, suivis par de véritables sanglots. Pour accompagner Cécile dans l’expression de sa douleur, je décide de laisser vivre mon impulsion empathique en posant ma main sur la sienne. Ma façon de lui communiquer par ce contact : « je suis là, vous n’êtes pas seule ! ». Lorsque le geste est juste, j’ai toujours observé que cela encourageait le patient à davantage exprimer ses émotions douloureuses.

Soubresauts au niveau de la nuque et des épaules. « J’ai l’impression d’étouffer, qu’on m’écrase la poitrine! » dit-elle. Et elle poursuit en revisitant ce fameux jour où, à douze ans, elle a atterri sur la nuque en faisant du trampoline dans un cours d’éducation physique. Plus la journée passait et plus elle avait mal, elle ne pouvait plus bouger sa tête tellement elle avait mal. Elle retrouve le moment où son père, pour la débloquer, avait essayé de lui passer le sèche-cheveux et ça la faisait hurler de douleur. Douleur qui durera toute la nuit et continuera avec le travail de l’ostéopathe le lendemain… Le récit se poursuit, entrecoupé de sanglots et de secousses dans le haut du corps. Elle évoque ses trois cervicales déplacées et le kinésithérapeute qui lui faisait très mal en la manipulant. Elle se souvient qu’à ce moment-là, elle prendra la décision de ne plus jamais être casse-cou…

2° séance : Je lui propose de retrouver la scène du trampoline, en se laissant ressentir et vivre ce qui lui vient. Ce qu’elle fait, accompagnée de pleurs et de sanglots.

Elle fait état d’une sensation de piqûre au niveau des vertèbres lombaires, ainsi que d’une douleur dans l’oreille gauche. Elle revit le moment, où en l’air, elle voit qu’elle va se faire mal. La douleur dans les lombaires et dans l’oreille augmente aussitôt, le sentiment de peur aussi. Elle évoque à nouveau le souvenir du retour à la maison en précisant : « Ça a été pire ! » La nuit qui a suivi a été la plus difficile, elle était paniquée à l’idée de rester comme ça toute sa vie. Puis revient encore le souvenir du kinésithérapeute. Elle avait très peur sur le moment parce que ça craquait, mais elle avait ressenti un soulagement. L’angoisse est maintenant moins forte. Je lui propose alors d’essayer de mobiliser toutes ses ressources d’adulte, pour venir consoler et rassurer la petite Cécile, en s’imaginant elle, l’adulte qu’elle est aujourd’hui, venant expliquer à la petite Cécile de 12 ans ce qui vient de lui arriver : les vertèbres déplacées, les soins nécessaires, la convalescence… Bref tout ce que l’on aurait dû dire et expliquer à l’enfant pour l’accompagner et la rassurer. Elle se laisse aller dans ce scénario et l’angoisse diminue encore.

Je décide alors de commencer à travailler la scène du chiropracteur : elle ne se sent pas très bien en se remémorant la scène, mais ne ressent pas de douleur. Seulement du stress, de l’angoisse. Elle sent ses jambes en coton en terminant la séance.

3° séance : Au rappel du souvenir du trampoline, je perçois des petits tremblements dans le haut du corps, épaules, nuque et tête, ainsi qu’une accélération de sa respiration. Son visage paraît renfrogné. Elle exprime ensuite le besoin de bouger ses épaules, car précise-t’elle : « à l’époque je me sentais de travers avec cette zone en feu ». « Je sens que çà travaille » ajoute-t’elle. Puis les pleurs et les sanglots reviennent, moins forts que la dernière fois. Elle perçoit maintenant des sensations bizarres comme si sa nuque allait lâcher, que sa tête pourrait tomber et qu’elle doit donc la serrer très fort. Elle a peur de ne pouvoir la retenir.

4° séance : Souvenir du trampoline. Elle bouge les épaules, pas d’angoisse, pas de stress, juste un léger mal de tête, « là où je suis tombée » précise-t’elle. Au bout de quelques stimulations auditives : c’est passé, elle ressent maintenant une grande fatigue, elle se sent vidée. Un peu plus tard, elle perçoit sa tête lourde et des picotements dans la région occipitale. Quand je retourne à la scène initiale : « Ça va » me dit-elle, ajoutant que sa nuque a craqué cette semaine mais que ça ne l’a pas angoissée.

Je lui demande de revisiter le souvenir du chiropracteur. Au départ sensation d’un frisson dans le dos, mais qui passe très vite. Je l’interprète comme un reste de peur en train de s’évacuer. C’est passé. Puis plus rien.

J’attaque pour la première fois la scène chez le coiffeur, quand elle doit renverser sa tête vers l’arrière, en lui demandant de se remémorer le moment où elle fait ce geste, voire en se laissant aller au même mouvement ici sur son fauteuil. Elle bouge très légèrement les épaules, évoque une petite angoisse d’avoir sa tête en arrière, en se souvenant du contact du bac avec ses muscles tendus et douloureux.

5° et dernière séance : Souvenir du trampoline : J’observe de légers spasmes musculaires pouvant aller jusqu’à de plus fortes secousses dans son bras droit. Elle me dit avoir ressenti alors un déblocage dans sa nuque et dans son épaule, accompagné d’un relâchement des mâchoires. Puis elle retrouve une image harmonieuse de son corps quand elle ferme les yeux.

Souvenir du chiropracteur : « Ça va ». Elle n’a plus aucune gêne dans les cervicales.

Chez le coiffeur : Elle bouge la tête, lève son bras droit, fait part de fourmillements dans le haut du dos et d’un relâchement dans sa nuque. J’interprète ces fourmillements comme la sensation qui apparaît lorsqu’un barrage cède dans le corps, et que l’énergie circule à nouveau. Cette sensation de fourmillement agréable disparaîtra rapidement, dès que le cerveau s’y sera habitué.

Fin de séance : Aucune sensation et aucun affect douloureux. L’évaluation de la perturbation au souvenir des trois images cibles est tombée à zéro, et la pensée positive « je vais bien, je suis en sécurité » est ressentie vraie à 7 sur 7.

J’interprète l’accident du trampoline, avec la douleur, mais aussi la solitude et l’angoisse dans laquelle on lui a laissé vivre l’après, comme étant le traumatisme initial. Ses parents, aussi angoissés qu’elle, n’ont pu lui apporter le soutien adéquat. Elle évoquera très bien cela dans l’avant dernière séance en disant : « Ma mère m’a refilé ses angoisses! ». Le chiropracteur, en l’alarmant avec son appréciation menaçante « c’est dangereux ! », viendra réactiver le trauma initial. On peut aussi parler de rappels traumatiques au moment des shampoings chez le coiffeur, lorsque sa nuque se fige à nouveau, provoquant la résurgence d’une peur panique, qu’elle a alors le plus grand mal à maîtriser.

Cécile me confiera bientôt, qu’aller chez le coiffeur n’est plus un problème pour elle.

2 Cicatrisation par l’imaginaire

Parfois le travail en analyse bioénergétique paraît avoir libéré l’émotion, le patient n’est plus figé, mais les perturbations n’ont pas entièrement disparu. Je propose alors de travailler en EMDR pour tenter une plus grande cicatrisation. Dans mon observation, cette cicatrisation s’obtient, en substituant au vécu réel et à l’impuissance qui y est associée, un autre scénario d’action, de réussite, un scénario gagnant qui viendra s’y superposer. Le patient viendra faire défiler ce scénario gagnant dans son imaginaire, pendant que je pratiquerai les stimulations auditives.

2.1 Dans les traumatismes simples

En EMDR, on entend par traumatisme simple un évènement traumatique ponctuel unique, souvent extrême en intensité, mais qui a duré un temps très court. On peut mettre sous ce registre l’accident, l’agression, le viol, l’attentat.

La plupart du temps, dans ces traumatismes simples, la création d’un scénario positif se fait spontanément par le patient lui-même, dès lors que les affects gelés peuvent être mobilisés et s’évacuer. Le thérapeute ne fait alors qu’accompagner son patient dans le processus.

Vignette clinique : L’accident : Nathalie

Nathalie ressent une forte angoisse en voiture, depuis qu’elle a vécu il y a quelques mois un accident de la circulation, alors qu’elle se trouvait à côté de son mari qui conduisait. Longue ligne droite, tout est paisible. Soudain une voiture vient en face et peu à peu dérive de sa trajectoire, traverse l’espace médian et leur fonce dessus. Cela constituera la première image pour le traitement EMDR. Dans un réflexe pour éviter le choc, son mari tourne le volant à droite, et la voiture bascule et se retourne dans le fossé. Nathalie gardera gravée en elle, l’image de se retrouver à l’envers dans sa voiture, voir l’eau rentrer par le toit et monter peu à peu. Je lui proposerai de prendre cette image comme seconde cible. Retrouvant ces souvenirs, l’affect ressenti est la peur panique qu’elle évalue à 9 sur 10 ; la pensée négative qui lui vient : « je vais mourir » et la pensée positive « je suis en sécurité » n’est ressentie comme vraie qu’à 4 sur 7.

1ère séance : Je sens Nathalie tout de suite très tendue. Sans attendre, afin de profiter de l’émotion présente, j’entame les stimulations auditives en lui demandant de se laisser revivre toute la scène. J’observerai une détente apparaître sur son visage et dans ses épaules au fur et à mesure de la séance. Voici ce qu’elle m’en dira ensuite : « Ça fait moins d’effet ! Il a cassé la vitre et on est sorti par la fenêtre ! Des témoins ont vu. On a réussi à éviter le choc ! ».

Je poursuis les stimulations en lui demandant de retrouver l’image de la voiture qui leur fonce dessus. Ce qu’elle en dira : « c’est un trou noir, comme si je m’élevais au-dessus de la voiture. Je me sens en sécurité, dans du coton noir ! ».

Puis de recontacter la seconde image quand l’eau monte dans la voiture. Ce qu’elle en dira : « J’ai crié. L’eau s’arrête de monter. Je me vois me glisser par l’ouverture comme une anguille, puis partir normalement. Il y a des gens à côté. Je vois aussi qu’il n’y a pas beaucoup d’eau dans le fossé. »

Je lui demande de revoir à nouveau la deuxième scène. Son récit : « Je vois mon mari s’extraire de la voiture, puis me tendre la main pour m’aider à sortir à mon tour ! »

2ème et dernière séance : Très courte.
A deux reprises, je lui demande de retrouver les deux images cibles de l’accident. Récit de la scène qu’elle voit maintenant : « Ça ne faisait plus peur. Les gens autour applaudissaient quand nous sortions du véhicule. Comme si nous tournions un spectacle ! ».

La perturbation est tombée à zéro. La pensée positive « je suis en sécurité » est à son maximum de 7 sur 7. J’interprète le « j’ai crié » comme une expression de la panique, même si je n’ai pas observé de manifestation corporelle particulière à ce moment-là. On assiste ensuite à une recomposition spontanée du tableau initial de l’accident, où elle se voit à l’extérieur de la scène, hors d’atteinte et donc en sécurité, ou même comme dans la dernière image, actrice dans un spectacle, comme un évènement virtuel.

Après ce traitement, Nathalie retrouvera rapidement détente et tranquillité au volant de sa voiture.

2.2 Dans les traumatismes complexes

En EMDR, on entend par traumatisme complexe, un évènement traumatique qui va se répéter et entraîner autant de retraumatisations. On peut alors parler de traumatisme développemental.

Ici le traumatisme s’avère davantage incrusté dans la personne. Ce qui s’explique, du fait qu’une personne subissant des attaques répétées dans le temps, finit par construire en elle un réseau de défenses approprié, afin de limiter l’impact des blessures et survivre à la situation.

Vignette clinique : Marion

Marion est une jeune femme de 36 ans au moment où elle vient me voir, pour se réconcilier avec l’image de son corps, et faire dit-elle, la paix avec elle-même. Je remarquerai surtout ses grandes ressources, sa tendance à se sacrifier pour l’autre, alliée à un manque d’affirmation de soi. L’agressivité a bien été travaillée en analyse bioénergétique, mais sans jamais pouvoir la relier véritablement au sentiment de colère sous-jacent. Je lui propose de travailler cela en EMDR, en partant notamment de la relation difficile avec son beau-père, qu’elle subira de l’âge de 8 ans jusqu’à son départ du toit familial vers 20 ans. Ses parents se sépareront alors qu’elle a 6 ans. Enfant unique du couple, sa mère obtiendra sa garde, avant de se remettre en ménage avec un homme violent psychologiquement, et que Marion qualifie elle-même de véritable tyran domestique. Il s’emporte pour un rien, crie, insulte, dévalorise… Marion accepte de travailler ces multiples scènes subies tout au long de ces années. Nous choisirons comme cible initiale la période où Marion devait aller l’aider, pendant ses vacances scolaires, lorsqu’il faisait les marchés dans la vente de fruits. La moindre erreur ou maladresse le faisait sortir de ses gonds. L’image initiale : elle laisse tomber un fruit et il s’emporte, vocifère contre elle en plein marché : « tu es une véritable empotée ! » lui assène-t’il.

L’intensité ressentie de la perturbation, lorsqu’elle évoque ces souvenirs maintenant est évaluée à 8 sur 10. Cette perturbation est faite de peur, d’impuissance, de dévalorisation, d’injustice, du sentiment d’être piégée, mais aussi d’une grande tristesse. La pensée négative est « je suis en danger », et la pensée positive qu’elle aimerait bien pouvoir y substituer « je suis en sécurité », n’est ressentie comme vraie qu’à 1 sur 7.

1ère séance : Marion a du mal à entrer dans la scène. Elle dit ressentir un état de sidération, de figé, elle ne peut que le regarder, sans rien pouvoir faire ou dire. Elle revoit ensuite défiler à grande vitesse bien d’autres situations analogues. Comme cette fois où il l’avait traitée de fainéante alors qu’elle s’était trouvée mal et avait perdu connaissance. Elle se sent envahie d’un sentiment d’impuissance et d’injustice à la fois, « c’est comme s’il me rouait de coups mais avec des mots » ajoute-t’elle. Elle se souvient qu’elle pleurait tout le temps, qu’elle attendait que ça finisse, qu’elle vivait tout le temps dans l’insécurité, la peur que ça recommence… Elle me précise alors : « je me sens entre la veille et le sommeil, comme si mon corps était vidé de son sang, comme une perte de substance, comme si je n’avais plus d’appui au sol ! ». Je note les images qui lui viennent spontanément : « je deviens ratatinée, comme s’il me donnait des coups de pied pour m’aplatir, je n’existe plus et je vais devoir dépenser une énergie considérable pour me déplier à nouveau ! ». Je lui suggère le mot « terreur »… Lui vient alors le souvenir de ses yeux et de ses grosses mains : « oui il me fait peur, comme un ogre ! ». Enfant, elle rêvait qu’il la frappe, afin de pouvoir le dire à son père qui serait venu la chercher. Je lui parle, nous échangeons, je lui explique et elle me dira avoir vécu ce partage comme une reconnaissance. Je me permettrai d’ajouter : « Et oui vous étiez en danger ! ».

2ème séance : Elle se voit aussitôt plus adulte qu’enfant, oser poser les yeux sur lui avec un nouveau regard. Je lui propose alors de s’imaginer, elle l’adulte d’aujourd’hui, rentrer dans cette scène et venir s’interposer entre lui et la jeune Marion… « OK c’est difficile, c’est comme devant un animal sauvage » me dit-elle. Surmonter sa peur lui a demandé un effort, mais j’observe qu’elle a pu le faire. Je lui propose ensuite de s’imaginer, elle l’adulte d’aujourd’hui, venant sécuriser la petite Marion et l’assurer de sa protection. Elle m’exprime un doute sur sa capacité à la rassurer, mais accepte finalement de se laisser vivre ce scénario. Elle me dira ensuite : « OK, cela a pu se faire », ajoutant « je lui ai dit qu’à moi aussi il me faisait peur ! ». A la fin de la séance, elle exprimera mieux se sentir dans son corps, être plus ancrée dans le sol, et découvrir une image de la situation où elle voit son corps se redresser.

3ème séance : Dès qu’elle retrouve l’image initiale, elle se sent envahie de colère. Spontanément, elle s’imagine lui hurlant dessus mais se retient aussitôt. Je lui rappelle que la violence interdite est celle qui est directement exprimée en actes, pas celle imaginée et qui lui appartient. L’interdit c’est le passage à l’acte, pas l’imaginaire. Dès lors, la colère, la fureur même, s’évacueront dans un déchaînement imaginaire : elle se voit renversant l’étalage, tout saccager, lui donner des coups de pied dans le ventre avec un véritable sentiment d’explosion, mais réussissant finalement à l’arrêter dans son agression ! Elle ajoutera à la fin de cette abréaction imaginaire : « C’est possible de se défendre ! ». Elle exprimera aussi avoir perçu sa gorge très serrée au début. Cette sensation finira par se dissiper, laissant place maintenant à un sentiment de liberté et d’exaltation. Suivront d’autres situations similaires avec son beau-père, où elle laissera de la même façon libre cours à la libération de sa colère. En posant ma main sur son épaule, je lui demande maintenant de venir retrouver la petite Marion, qui a dû subir toute cette maltraitance, et se laisser ressentir ce qu’elle aurait envie de lui dire… Cela se fera dans l’émotion, secouée de profonds sanglots. Ce qu’elle lui a dit : « Maintenant je suis là, et je ne laisserai plus jamais faire une chose pareille ! ». Larmes encore, comme un sentiment de tristesse empathique pour la souffrance de la petite Marion. Elle ajoutera à la fin de la séance que son beau-père lui paraît maintenant plus petit physiquement, moins redoutable aussi.

4ème séance : En retrouvant l’image initiale, Marion s’est aussitôt perçue plus droite dans son corps. Spontanément, elle se voit leur dire aux deux, son beau-père mais aussi sa mère qui recolle à ce moment-là au scénario : « Non là ça ne va plus être possible » ! Dans le nouveau scénario qui surgit maintenant, son beau-père se tait. Elle dit éprouver aussitôt un sentiment de force et de fierté devant lui. Elle n’a plus peur de ses cris. Elle reverra alors bien d’autres scènes, où son beau-père se comportait violemment avec elle. Chaque fois, je lui demanderai en tant qu’adulte de venir imaginer s’interposer pour défendre la petite Marion, puis de renouveler son engagement de protection auprès d’elle. Au fur et à mesure que la colère continue de s’évacuer, le sentiment d’impuissance s’atténue, laissant place à une plus grande confiance, une plus grande estime d’elle-même aussi.

5ème séance : Dès l’image initiale, Marion lui a retourné le plateau de pêches sur la tête et a dit à sa mère : « on s’en va ! ». La majeure partie de la séance portera sur l’absence de réaction de sa mère qui ne l’a pas protégée. Viendra alors un immense sentiment de colère contre sa mère, puis des affects de tristesse, et à la fin une grande fatigue. La dernière image, ponctuée de pleurs et de sanglots, sera le souvenir quand sa mère et son beau-père se sont séparés, et où elles iront ensemble manger au Mac Do.

6ème et dernière séance : Elle est très calme. En retrouvant l’image initiale, elle se voit poser le cageot de fruits et lui dire calmement : « Si ça ne te vas pas, tu n’as que le faire toi-même ! », tout en le regardant comme si ça ne la concernait plus. Elle dit se sentir forte face à lui, avec un sentiment de supériorité allié à la sensation de sa force physique. Elle ajoute : « il ne me fait pas peur ! ».

La perturbation est désormais à zéro, la pensée « je suis en sécurité » à 7 sur 7.

En résumé, après le dégel et l’évacuation de la terreur, le scénario d’une reconstruction positive se nourrit émotionnellement chez Marion de l’expression de la colère. Marion puise aussi dans les ressources de l’adulte qu’elle est devenue aujourd’hui, les éléments d’un autre vécu possible, où elle peut se vivre comme un être respecté et protégé. Justement ce qui a fait défaut à la petite Marion, où aucun adulte n’était venu s’interposer pour la protéger. Elle s’appuie désormais sur sa part adulte pour venir protéger l’enfant en elle. Pour finir sur une position à la fois très assurée et très maîtrisée, lorsqu’elle lui dit « Si ça ne te va pas, tu n’as que le faire toi-même ! ».

En conclusion

J’observe que dans les deux thérapies, Analyse Bioénergétique et EMDR, le thérapeute œuvre à déclencher, puis à accompagner chez son patient, un processus naturel d’auto-guérison. Pour ce faire, l’analyste bioénergéticien tente de modifier les paramètres corporels, en augmentant le niveau énergétique, en reconnectant la perception ou en encourageant la libération de l’émotion. Le praticien EMDR vise la même chose par les stimulations bilatérales alternées.

Ce processus d’auto-guérison semble se dérouler en deux temps. D’abord dégel du trauma et libération des affects. Puis, dans un deuxième temps, réorganisation mentale des représentations du patient avec distanciation, remise en perspective, et en EMDR, création et substitution d’un scénario gagnant. La résilience semble alors s’obtenir par l’inscription de ce scénario positif dans le réseau neuronique, lequel viendra alors se superposer au scénario négatif réellement vécu par le patient.

Ce qui ne cesse de m’interpeller, c’est qu’agir directement par les mouvements du corps pour libérer les affects, comme frapper sur un coussin en ressentant la haine, décharge le patient de sa fureur et le voilà apaisé. Mais qu’il s’imagine frapper en revivant la scène et en éprouvant l’hostilité, semble le délivrer tout autant de sa charge affective, et là aussi, il obtient l’apaisement. Dans les deux cas, cela ouvre la voie à une élaboration mentale du traumatisme.

Et la même chose apparaît concernant la cicatrisation du trauma. Dans la vie courante, celle-ci s’origine le plus souvent dans le vécu d’une nouvelle séquence d’action réussie. Mais cette cicatrisation peut également prendre naissance, dans la création par l’imaginaire, d’un nouveau scénario gagnant. Comme si exécuter une action, ou s’imaginer l’exécuter, revenait au même et conduisait au même résultat. Pour peu que le déroulé de ce scénario imaginaire implique également l’émotionnel, mais aussi le corps. Je peux observer là aussi des mouvements dans le corps, des variations dans l’expression émotionnelle. Le patient vit l’émotion de son scénario gagnant.

Cela semble confirmer que le processus d’auto guérison fonctionne dans les deux cas. S’agit-il d’un même processus, appliqué à la partie émergente du trauma, et déclenché par un enchaînement de mouvements corporels dans l’Analyse Bioénergétique, par les stimulations bilatérales alternées dans l’EMDR ?

Comme si le cerveau savait ce qu’il avait à faire pour nous guérir du trauma, pour peu que l’on parvienne à créer les conditions adéquates pour cela. Le trauma est bien un évènement où l’information reste bloquée, voire gelée à un niveau physiologique, et ne peut déboucher sur un processus émotionnel et à fortiori mental. Comme si la pensée restait inopérante, car non alimentée par le niveau sensori émotionnel sous-jacent. La thérapie vise à créer les conditions nécessaires permettant le traitement de cette information, sa gestion « naturelle » par les niveaux supérieurs, à savoir émotionnel puis cortical.

Lorsque ce traitement a pu se faire, le traumatisme est intégré. Il devient un évènement comme les autres, sa charge affective a disparu, sa représentation, par l’élaboration permise, a pris un juste sens dans les référentiels de la personne. La perturbation n’existe plus, et le souvenir ainsi intégré peut dès lors être archivé. Il fait désormais partie du passé, en cessant d’être vivant et actuel, comme n’importe quel autre souvenir.

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